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Troisième message de la Retraite d’Hiver chez soi

17 Décembre 2018

Troisième message de la Retraite d’Hiver chez soi

Chère Communauté,

 

Savons-nous dans notre vie quotidienne générer un sentiment, une sensation de joie ? L’avons-nous vraiment expérimentée ? Est-ce que, une seule inspiration, expiration, a pu nous apporter ce sentiment, cette sensation de joie ?

 

Thây nous a souvent enseigné que cela est possible dès le premier pas, la première inspiration, mais peut-être lorsque nous faisons ce premier pas, cette première inspiration, nous ne ressentons rien… n’est-ce pas ? Et alors sans doute il nous faudra encore beaucoup de pas et de respirations conscientes pour un jour pouvoir dire : « oui, je ressens de la joie, du bonheur, dès le premier pas, dès la première inspiration ». Et il est aussi possible que la plupart du temps nous ne ressentions rien de particulier lors de notre marche, de notre assise ; c’est une sensation qui est encore neutre teintée d’une possible lassitude à cause de la répétition, teintée d’un ennui, parce que cela ne nous apporte pas l’effet tant attendu assez rapidement…

 

La joie est une pratique, c’est une méditation à part entière, ce n’est pas un endroit où nous allons arriver un jour ou l’autre, ou pas d’ailleurs, au gré des intempéries, des soucis de notre vie.

Lorsque Thây nous demande de générer une sensation de joie dès le premier pas, c’est une pratique de pleine conscience du corps dans le corps, paisiblement, que l’on peut faire tout de suite :

  • Nous avons un corps avec une respiration et dès le premier pas de notre marche, nous sommes attentifs à ce corps et à cette respiration, conscients(es) de nos pieds, nos jambes, nos poumons où l’air entre et sort ; conscients(es) du sol que nous foulons, de la terre, des arbres, de l’herbe ; conscients(es) des oiseaux, de leurs chants, de tous ces petits animaux qui vivent là dans le sol, les plantes, les minéraux ; conscients(es) de tous les amis, amies, qui pratiquent comme nous ; et si nous sommes seuls, conscients(es) des autres personnes qui ne pratiquent pas comme nous, qui parlent, qui courent, qui font du vélo,… mais cela ne nous dérange pas car nous ne faisons plus qu’un avec notre entourage immédiat, notre corps, notre respiration.
  • La joie est aussi une pratique du lâcherprise de nos afflictions, de nos soucis, de nos regrets ou encore de nos inquiétudes ; au moins à ce moment-là.

 

Lorsque nous marchons dans nos soucis, nous ne sommes pas vraiment présents(es) et nous ignorons totalement que nous avons un corps, une respiration ; nous ne voyons plus la présence de nos amis, amies, de notre famille, de nos enfants, de notre environnement ; nous ne savons même plus que nous avons des jambes qui marchent, des bras qui bougent, un cœur qui bat… et du coup, notre corps se raidit, s’affaisse, se nourrit des toxines que notre esprit soucieux diffuse partout en lui.

Notre corps est un véhicule précieux et merveilleux que nous devons entretenir en ayant une vie saine où nous ne sommes plus emportés par le flot tumultueux de nos pensées.

  • Revenir à notre corps à cet instant, juste en étant présent à nos pas, notre souffle, légèrement et librement, c’està-dire libre des soucis et des préoccupations, maintient notre véhicule en bon état, notre corps en bonne santé, ne permettant pas aux toxines de se développer.

 

Ceci pour aborder la Porte de Libération sur l’Absence de Signe, dans la continuité de l’enseignement de Thây, du 5 juin 2014, où apparaît cette notion de différents corps qui peuvent composer tout notre être ; nous n’avons pas qu’un seul corps, limité à ce que nous paraissons physiquement et ayant une existence séparée.

 

 

 

Le corps physique : - asseyons-nous, marchons, ou même allongeons-nous sur le sol, et voyons de quoi est composé notre corps :

  • Il ne se limite pas seulement à sa forme apparente, et nous pouvons voir profondément que ce corps est composé de grandes quantités de cellules humaines et non humaines, de bactéries innombrables, de tous petits êtres vivants sans lesquels nous ne pourrions survivre nousmêmes. Voyons que notre corps est à lui seul une véritable communauté immense.

 

  • Le corps de Bouddha : chacun, chacune d’entre nous à la capacité à devenir un être éveillé et nous portons en nous cette capacité à chaque instant de notre vie ; cette capacité, cet état d’éveil est toujours là présent en nous et disponible, qui n’attend qu’une seule chose, que nous le touchions et le fassions germer telle une graine de lotus. Pour cela, prenons le temps de nous arrêter, quelques secondes suffisent, afin de toucher la vie présente en nous sans être emportés(es) par nos pensées, ne seraitce même qu’une toute petite pensée, conscients(es) de notre respiration pour générer et expérimenter cet état de libération (un son de cloche peut aider beaucoup)

 

  • Le corps du Dharma : c’est le corps de la pratique spirituelle, l’entraînement de l’esprit à ne plus être contraint par les préoccupations, mais plutôt à se sentir libre et léger dans notre façon de vivre au quotidien, là où nous nous trouvons : ouvrir le robinet d’eau doucement pour se laver les mains, ou boire, et voir clairement d’où vient cette eau, c’est déjà avoir une pratique spirituelle, c’est déjà manifester son corps de Dharma ; cela veut dire que nous sommes déjà capables de générer notre esprit d’éveil, conscients(es) de notre corps, de notre environnement, de l’eau qui coule sur nos mains…. L’eau ne vient pas seulement du robinet !

 

  • Le corps de la Sangha : dans la pratique de la méditation nous devons avoir un endroit où nous réfugier, un refuge, qui s’appelle la Sangha, la Communauté BienAimée, qui prendra soin de nous lorsque nous sommes perdus ; si nous restons seuls(es) nous pourrions alors être bientôt comme desséchés(es). Rejoindre ou créer une Sangha pour nous soutenir dans notre pratique avec des amis, amies, qui cultivent comme nous le jardin de la pleine conscience du corps et de l’esprit.

 

  • Le corps hors du corps : voici un exercice très simple et facile à mettre en œuvre pour entrer en contact avec, par exemple, le corps de notre Maître hors de son corps, que nous touchons très souvent sous la forme d’enseignements DVD, sous la forme de livres, de calligraphies, de souvenirs intimes, mais aussi sous la forme de Frères et de Sœurs monastiques ou laïques, etc… Et pour nous, où se trouve notre corps hors du corps ?

 

  • Le corps de continuation : il est là aussi très aisé de voir le corps de continuation de Thây dans notre façon de marcher, de s’assoir, de respirer ou de générer une sensation de joie, un sentiment de paix ; dans notre façon de mettre en pratique les enseignements dans notre vie de tous les jours. Si la joie est présente, ou la paix, le bonheur, si notre pratique inspire et nourrit de nombreux amis, amies, de notre communauté ou dans notre travail, famille, alors c’est sûr, nous sommes le corps de continuation de notre Maître.

 

  • Le corps cosmique : tout le monde sait bien que nous sommes composés des mêmes éléments qui se trouvent dans le cosmos, que ce soit les atomes, les molécules, ou autres photons, bactéries, cellules, etc… nous faisons partie intégrante de notre planète, la Terre, de la nature, du soleil, de la lune, de tout ce qui compose l’univers comme les corps célestes, les astéroïdes et autres météorites, etc…  et si nous pouvions imaginer enlever un seul de ces éléments alors sans doute nous ne pourrions pas être là nous plus. Essayons de voir d’où est venue la vie alors même que la Terre n’était encore qu’un bloc de roches en fusion…

 

  • Le corps ultime : C’est le niveau le plus profond du cosmique : la nature de réalité même. Notre conscience du tréfonds, l’Alaya, est capable de toucher directement la réalité en soi, audelà de toute forme, de toute apparence, de toute notion ; au-delà de la discrimination entre l’être et le non-être, la vague et l’océan. C’est l’Inter-Etre, c’est la vision directe à  que toutes les choses, tous les dharmas, sont imbriqués les uns dans les autres pour pouvoir se manifester ensembles, de la plus lointaine galaxie jusqu’au plus petit grain de poussière. Tout ce que nous pouvons voir et ressentir mais aussi tout ce que nous ne voyons pas et ne ressentons pas, parce que nous sommes là pleinement présents à cet instant et parce que nous ne sommes pas en dehors de la conscience de l’InterEtre… C’est encore la vision claire de tous nos corps qui composent notre être. Essayons alors de toucher cela lorsque nous préparons un plat pour manger, du chou vert par exemple : en lavant et coupant le chou vert essayons de voir le corps ultime du chou ; peut-être au début nous pensons que le chou vert est juste un chou vert bien réel qui se trouve là en tant que chou vert : cela risque d’être une croyance pas plus. Alors en tant que pratiquant nous allons porter un regard plus profond afin d’aller au-delà de l’apparence et voir que ce chou vert est composé de plein de choses qui ne sont pas le chou vert, comme la terre, la pluie, le soleil, le jour et la nuit, le jardinier, la graine du chou, etc… peu à peu nous commençons à vraiment apercevoir le chou avec tous ses corps de manifestation, c’est notre pratique. Puis un jour nous prendrons le chou vert dans nos mains et nous dirons : « cher chou vert, je te vois vraiment maintenant, je vois ta vraie nature d’inter-être, et quand je t’observe profondément je sais que tu n’as pas d’existence séparée, de tous les dharmas, de toute chose, ni de moi-même, je suis en toi et tu es en moi… » ; c’est le corps ultime du chou au-delà de toute discrimination, c’est la vision directe à partir du tréfonds. Alors nous pourrons dire que nous « voyons » vraiment le chou parce que nous serons capables de voir sa vraie nature interdépendante.

 

« Un esprit clarifié et tranquille n’est ni borgne ni aveugle, il embrasse tous les aspects de la réalité. La feuille de légume que vous tenez dans votre main devient le corps sacré de l’ultime réalité et ce corps que vous tenez avec respect redevient simple légume… »

Maître Dôgen (Instructions au cuisinier zen)

 

« Nous voulons tous savoir d’où nous venons et où nous allons. Et par-dessus tout, nous voulons être heureux. L’humanité a donné naissance à de nombreux artistes talentueux : musiciens, architectes… mais combien d’entre nous ont maîtrisé l’art de créer un moment de bonheur pour nous-mêmes et pour notre entourage ? »

Thích Nhất Hạnh (L’art de vivre)

Troisième message de la Retraite d’Hiver chez soi
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C
Merci Beaucoup
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L
Merci pour ces beaux articles qui soutiennent notre pratique notre reliance ????????.
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F
Merci infinement
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M
Merci chère Sangha de nourrir cet hiver d'une lumière d'éternité. J'ai toujours un livre de Thay sur mon chevet. Alors chaque soir et chaque matin, je lui dis "Bonjour Cher Maître. Vous êtes là. Vous serez toujours là. Aujourd'hui encore, je vais essayer de vivre en paix avec moi-même et avec les autres. Je vais essayer de faire le plus de pas possible dans les vôtres ".
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