Question à Thay à propos du complexe d'égalité
Question :
Cher Thay, chère Sangha, au début de notre séance de pratique,ici tous les matins au Village des Pruniers et également l’an dernier pendant la tournée américaine, nous avons été invités à transformer le soi illusoire et à transformer nos complexes d’infériorité, de supériorité et d’égalité. En Amérique, la formule “complexe d’égalité” remplit les amis d’une grande confusion et de consternation. Dans notre pays, l’égalité est non seulement une obligation légale mais c’est aussi un mot-clé du mouvement des droits humains. Je me demande si vous pourriez nous donner, à moi et à mes amis, plus d’informations sur ces complexes et sur la façon de pratiquer sur ce thème?
Réponse :
Le complexe d’égalité peut entraîner beaucoup de souffrances. Ce n’est pas l’égalité en soi qui entraîne la souffrance, mais le « complexe d’égalité ». Nous devons comprendre le sens du mot “égalité”. Nous savons que le complexe de supériorité nous cause de la souffrance à nous et à l’autre. Le complexe d’infériorité, la faible estime de soi, peut être l’origine de nombreuses maladies mentales et nous croyons que l’égalité, le droit d’être égal, est la solution. Mais la pratique de l’enseignement du Bouddha est très profond. Nous souffrons car nous nous comparons à l’autre. “Je suis mieux que lui”, est le complexe de supériorité. “Je suis pis que lui”, est le complexe d’infériorité. Mais “Je suis son égal”, est aussi un complexe car si vous essayez d’être égal, vous essayez d’argumenter que vous êtes égal, et vous continuez de souffrir. Or dans l’enseignement du Bouddhisme, il n’y a pas de soi, si bien que la comparaison n’a pas lieu d’être et c’est alors que le bonheur est parfait. Vous ne comparez plus, et vous pouvez dire : “chéri, tu es moi et je suis toi. Ta souffrance est ma souffrance; ton bonheur est mon bonheur.” C’est beaucoup plus profond. C’est là que la vision de l’inter-être est très importante. Quand vous méditez, vous voyez que vous ne pouvez qu’inter-être, que vous ne pouvez pas exister uniquement par vous-même, vous devez « inter-être » avec l’autre. C’est pourquoi au Village des Pruniers, nous disons : « Tu es, donc, je suis. » Nous inter-sommes ; nous ne voyons pas un individu qui souffre et qui est heureux seul, nous voyons un couple qui vit en harmonie et qui considère le bonheur de l’autre comme son bonheur, la souffrance de l’autre, comme sa souffrance. Ainsi donc, l’harmonie est la base du bonheur et de la paix, et cette harmonie a pour fondement la vision de l’inter-être.
Dans la pratique de la pleine conscience, non seulement essayons-nous d’ôter les complexes d’infériorité et de supériorité, mais aussi le complexe d’égalité. Dans la notion « Je suis aussi bien que lui », « j’ai le droit d’être aussi bien que lui », il y a toujours un soi, et par conséquent il y a toujours comparaison.Tant que vous continuez de comparer, vous souffrez. Mais avec la vision de l’inter-être, vous ne comparez plus car « vous êtes l’autre et l’autre est vous. » Il y a harmonie, paix et bonheur. Je crois que c’est assez simple pour que vos amis le comprennent.