Introduction à la Retraite d'Hiver 2017-2018 à la maison
Une des grandes merveilles de la vie est encore là pour nous, et nous sommes également encore là pour la contempler et nous en nourrir : le rythme des saisons. Les saisons se manifestent encore sur notre maison la Terre avec majesté, avec beauté, avec force et avec tendresse… et nous ne restons pas sans savoir que ces phénomènes inter-dépendants sont profondément influencés par nos activités humaines. D’un autre côté, nous nous souvenons certainement que notre corps et notre esprit suivent eux aussi l’influence des changements naturels à chaque saison. Du fait que l’air que nous respirons l’automne est différent de celui qui nous pénètre l’été, du fait que les aliments qui poussent l’hiver - à l’état naturel et moins chamboulé par nos idées folles - ne sont pas du tout ceux que nous récoltons et consommons au printemps, du fait de la diminution ou de l’augmentation du nombre d’heures diurnes, du fait des températures auxquelles nous nous adaptons (encore), du fait que les paysages qui s’offrent à nos yeux et que les chants du vent, de l’eau, des animaux, inspirent les renouveaux de nos émotions…
L’hiver qui arrive succède à un été et un automne de sècheresse sérieuse dans notre pays. Peut-être, sans doute, avons-nous l’espoir que les trois ou quatre mois à venir soient une saison plus clémente, c’est-à-dire moins abîmée par la pollution que nous générons, peut-être rêvons-nous de sentir le vrai froid, de voir le givre et la neige dans des proportions idéales pour la dormance de nos arbres et la stratification de nos graines et pour un printemps enchanteur. Il se peut que nous sentions aussi cette nécessité de nous reposer du travail à l’heure où le soleil se couche, de ralentir tout simplement à défaut d’hiberner comme les ours ! Certains d’entre nous aiment retrouver le temps des arbres nus pour nous défaire d’objets, de pensées et d’habitudes superflus, de sorte à alléger notre espace de vie et notre mental. Ainsi les moines et moniales du Village des Pruniers ces jours-ci, étant sur le point de commencer la Retraite d’Hiver (Varsa) 2017-2018, changent de chambre et donc de voisin-e-s de lit, font le tri dans leurs possessions matérielles accumulées et déposent ce qui n’est plus indispensable (vêtement, livre, thermos, cahier, stylo, lampe de poche, snacks, rasoir jetable, savon par exemple) sur une table appelée pour l’occasion ‘releasing party’ (fête du vide-grenier gratuit). Les frères et soeurs qui passent devant et manquent d’une chose ou l’autre peuvent se servir ! Le reste part souvent au Secours Catholique, ou bien dans un placard communautaire en attendant la prochaine ordination de novices.

Il règne une certaine excitation parce que la retraite d’hiver signifie pour nous 90 jours de résidence dans nos centres de pratique respectifs, aucun engagement extérieur tel que ceux qui nous amènent le reste de l’année à prendre la route pour guider des retraites ou journées de pleine conscience dans d’autres pays. Alors c’est une grande réunion de famille monastique, un ancrage de stabilité de la communauté, un re-serrage des liens entre Frères, entre Soeurs, entre nous tous. C’est évidemment le moment d’approfondir beaucoup la contemplation et la pratique sur le plan individuel, chacun et chacune de nous formulant pour nous-même et notre mentor / tuteur, tutrice monastique l’intention de focaliser ces 90 jours sur une ou deux ‘problématiques’ personnelles. Par exemple, une jeune soeur prend la résolution d’écrire chaque soir dans son carnet de kung-fu (ne pas confondre avec l’art martial, kung-fu signifie ici ‘pratique quotidienne’) pour faire le bilan de la qualité de pleine conscience dans les actes tels que se réveiller le matin, mettre ses pantoufles, marcher jusqu’à la salle de bains, ouvrir le robinet, prendre la position de méditation assise, suivre sa respiration et les états de son esprit (pour en savoir plus, se référer aux poèmes ou gathas de pleine conscience présentés dans le livre Chants du Coeur). Autre exemple, un frère portera son attention pour transformer progressivement une habitude de réaction dans la hâte héritée de ses ancêtres. En étant chacun assidu pour suivre l’emploi du temps de la communauté, nous prenons refuge dans l’importante énergie collective ainsi générée et nous progressons sans trop d’efforts dans nos méditations.

Il y a de plus en plus d’amis qui s’arrangent pour venir suivre cette retraite d’approfondissement et de transformation dans nos différents centres, ces personnes restent pour la totalité des 90 jours, ou bien pour une période plus courte ; et il y a aussi des centaines de personnes qui s’organisent pour faciliter leur pratique de pleine conscience, de concentration et de vision pénétrante à la maison. La participation à la Sangha locale constitue un appui joyeux pour ceux et celles d’entre vous qui avez la chance d’en fréquenter une. Nous sommes très reconnaissants et inspirés de pouvoir cheminer avec vous tous, et espérons que les messages que nous publierons sur ce blog au cours de l’hiver vous accompagneront de façon positive et accessible ! Collectivement cette année nous allons nous pencher sur les enseignements de Thay donnés entre 2005 et 2007 sur les 40 Thèses de l’enseignement du Village des Pruniers, et si tout va bien en parallèle avec ces thèses, nous continuerons d’éclairer notre pratique des Cinq Entraînements à la Pleine Conscience.
Dès maintenant nous vous invitons à vous offrir le temps et l’espace pour vous préparer à votre retraite d’hiver à la maison : vous pouvez choisir de faire un peu de tri et de nettoyage, d’aménager votre coin de respiration et de silence, de vous asseoir pour écrire ce sur quoi vous voulez vous concentrer pendant trois mois, de discuter avec vos bien-aimés ou votre Sangha de la meilleure façon de vous soutenir mutuellement pendant la saison du retour à soi, de fixer le(s) moment(s) où vous ferez ensemble une marche méditative, un repas en pleine conscience, un partage sur votre pratique suivant les messages proposés, ou encore où vous ferez ensemble un Renouveau. En tant que moines et moniales notre pratique de ne pas sortir des frontières physiques du monastère implique aussi, comme nous le rappelle Thay chaque année, de rester pleinement présents pour notre Sangha en ne sortant pas à travers internet ou le téléphone à moins que cela ne soit réellement nécessaire. Chez vous, tâchez aussi de réduire ces éléments qui vous entraîneraient loin du présent et des êtres avec qui vous vivez. Posez-vous la question : comment puis-je m’arranger pour faire les courses moins souvent, être moins exposé aux stimulations des désirs matériels ? Quelle stratégie adopter pour reposer mon corps et mon esprit ou pour nourrir la joie authentique le samedi soir ? Quel est l’objet de ma conversation téléphonique avec cette personne aujourd’hui, puis-je m’en tenir simplement à m’assurer que la personne va bien, à régler les sujets en question puis à prendre congé plutôt que de parler pour nous distraire mutuellement ou même pour aborder des paroles néfastes ? etc…
La cérémonie d’ouverture des 90 jours aura lieu mercredi 15 novembre (à la Maison de l’Inspir elle commence à 10h précises), vous pouvez nous rejoindre avec bonheur ! Vous pouvez aussi marquer cette ouverture à domicile, ainsi que celui de la clôture le 12 février 2018, par les rituels qui font sens pour vous. Dans l’esprit de la prise de refuge dans l’île intérieure et de la reconnection avec le cycle des saisons, nous vous souhaitons une merveilleuse retraite d’hiver…