Premier message d'inspiration pour la Retraite d'Hiver 2017-2018 à la maison
Chères amies, chers amis, qui nous accompagnez dans cette aventure intérieure de la retraite d’hiver chez soi, pour ce premier message, et afin d’être en lien avec le Village, nous devons patienter avant d’aborder le thème des quarante propositions.
Nous vous proposons une réflexion sur le sens de ce que peuvent être les frontières lorsque nous ne bénéficions pas de cette aide que procure nt les frontières géographiques. Pour la plupart d’entre nous, il est impossible de se retirer du monde .
En effet dans notre vie familiale, professionnelle, associative et notre environnement, nos sens sont continuellement sollicités. Nos six sens vont nous guider dans nos choix de consommation, nos décisions ; ce sont les portes d’entrée de la représentation que nous nous faisons de notre monde, mais ce n’est pas et de beaucoup la totalité du monde. Les astrophysiciens estiment ne connaître au mieux que 5 % de l’univers, nous ne faisons vraisemblablement pas mieux dans notre propre univers.
Nos frontières vont être les « filtres » que nous installerons aux portes d’entrée des six sens.
De quels outils disposons nous pour ces filtres ?
Les enseignements bouddhistes et plus particulièrement ceux de Thay nous offrent de nombreuses pistes de pratique et de réflexion.
Pratiquer en Sangha
Si nous avons la chance de pouvoir pratiquer en Sangha, nous pouvons cultiver cette intention d’avoir une belle et généreuse Sangha en s’appuyant et en relisant le document « Qu’est-ce qu’une Sangha du Village des Pruniers ?».
Comment pouvons-nous ensemble favoriser et développer l’harmonie dans la Sangha, en pratiquant le lâcher prise (l'un des sept facteurs d'éveil) et la non-poursuite (l'une des trois portes de la libération), tout en gardant notre profonde détermination d’être dans les Pas du Bouddha et de Thây ?
Avec les entraînements
Parmi les entraînement le cinquième nous mettra au plus près de nos préoccupations pour développer la protection de nos sens.
Cet entrainement nous amène à méditer sur notre consommation et les valeurs éthiques que nous souhaitons promouvoir.
Une retraite d’hiver n’y suffirait peut-être pas ! Alors nous vous proposons quelques pistes tout simplement et en toute modestie
Nous pouvons relire dans le cinquième entrainement
« Cinquième entraînement : Transformation et guérison
Conscient-e de la souffrance provoquée par une consommation irréfléchie, je suis déterminé-e à apprendre à nourrir sainement mon corps et mon esprit et à les transformer, en entretenant une bonne santé physique et mentale par ma pratique de la pleine conscience lorsque je mange, bois ou consomme. Afin de ne pas m’intoxiquer, je m’entraînerai à observer profondément ma consommation des quatre sortes de nourritures : les aliments comestibles, les impressions sensorielles, la volition et la conscience. Je m’engage à ne pas faire usage d’alcool ni d’aucune forme de drogue, et à ne consommer aucun produit contenant des toxines comme certains sites internet, jeux, films, émissions de télévision, livres, magazines ou encore certaines conversations. Je m’entraînerai régulièrement à revenir au moment présent pour rester en contact avec les éléments nourrissants et porteurs de guérison qui sont en moi et autour de moi, et à ne pas me laisser emporter par des regrets et des peines quant au passé, ou par des soucis et des peurs concernant l’avenir. Je suis déterminé-e à ne pas utiliser la consommation comme un moyen de fuir la souffrance, la solitude et l’anxiété. Je m’entraînerai à regarder profondément la nature de l’interdépendance de toute chose, afin qu’en consommant, je nourrisse la joie et la paix, tant dans mon corps et ma conscience que dans le corps et la conscience collective de la société et de la planète.… »
C’est un véritable mode d’emploi pour observer nos choix de consommation.
Petites pistes pour ce message :
Pour beaucoup d’entre nous internet et les outils technologiques sont incontournables, Nous n’avons pas la chance de pouvoir dire « je ne vais pas utiliser ces outils pendant 3 mois », mais nous pouvons méditer sur l’usage que nous en faisons.
- savons nous l’utiliser avec modération et de façon appropriée ?
- Dans le foisonnement de prestataires, de producteurs d’applications cherchons nous à faire des choix éthiques ? Par exemple en favorisant les expériences collaboratives (attention , toutes ne sont pas éthiques), en portant un regard profond sur la notion de gratuité ; les sites vraiment gratuits ont besoin de dons pour vivre (Wikipédia, framasoft). Acceptons nous la facilité de livrer nos données pour disposer d’applications gratuites?…Faisons un petit ménage éthique sur nos choix dans l’usage d’internet.
Méditons sur nos six sens
En troisième partie de ce message, nous vous proposons aussi de méditer sur les six sens. Vous avez peut-être été intrigués par la formulation que nous pouvons retrouver dans les Soutra, le Satipatthana Soutra, le soutra de l’aide aux mourants et dans le « sutra de la sagesse qui nous mêne à l’autre rive ». Dans ce soutra, c’est ainsi présenté :
« Les dix huit domaines que sont les six organes des sens, les six objets des sens et les six consciences ne sont pas non plus dotés d’un soi séparé »
Pour ce message attardons nous sur la vue.
Nous avons :
- un organe : les yeux et tout le système nerveux associé
- un objet : une fleur, un paysage par exemple
- la conscience de ce que nous voyons. C’est l’attention que nous portons à un objet ; nous sommes entourés d’une foultitude d’objets que bien souvent nous ignorons non par négligence, mais parce que notre cerveau fonctionne ainsi.
Nous portons une attention particulière sur un objet ,cette attention peut être délibérée, ou cette attention peut-être sollicitée de façon inopinée : c’est par exemple la surprise de voir quelque chose d’insolite.
- Et aucun des trois éléments ( organe, objet, conscience) n’est doté d’un soi séparé ; nous pourrions dire aucun n’est autonome.
les yeux sans une bonne division cellulaire, le support du système sanguin, nerveux, hormonal… ne peuvent pas exister
La fleur sans la graine, le jardiner, le compost … ne peut pas exister
La conscience de voir- sans notre système nerveux et tout notre apprentissage (ceci est dangereux, ceci ne l’est pas)- ne se manifeste pas.
Nous pouvons méditer sur ce sens de la vue de façons différentes et complémentaires, nous permettant ainsi de pénétrer profondément cette porte d’entrée :
- Avec le support d’une méditation guidée (voir ci-dessous)
- Par la contemplation au quotidien ; en portant notre regard sur un objet, méditer sur nos yeux qui nous mettent en contact avec la merveilles des couleurs et des formes et sur l’interdépendance de toute chose.
- En se laissant pénétrer par le Koan proposé dans le Bahiya Soutra (voir ci-dessous)
« Dans ce qui est vu, il n’y a que ce qui est vu »
Nous souhaitons un beau démarrage dans la retraite d’hiver chez soi, nous vous retrouverons très prochainement pour un ou des témoignages.
Proposition de méditation guidée sur la vue comme porte d’entrée des sens.
Note : des méditants nous ont souvent fait la remarque d’avoir besoin de passer plus de temps sur la présence au corps et à la posture avant de pouvoir aborder l’attention à la respiration, la méditation peut être adaptée dans ce sens
1 En inspirant, je porte mon attention sur l’inspiration
En expirant , je souris
2 En inspirant, je reste attentif à toute la durée de l’inspiration
En expirant, je reste attentif à toute la durée de l’expiration
3 En inspirant, je suis attentif à toutes les sensations corporelles des pieds à la tête
(Ce peut être des tensions, ou le silence du corps souvent signe de bien être)
En expirant, j'accepte et je détends mon corps
4 En inspirant, je suis conscient d'une sensation de sérénité
En expirant, j'observe comment cette sensation se manifeste dans le corps
5 En inspirant, je porte mon attention vers mes yeux
En expirant, j'exprime ma gratitude pour cette merveille du corps
6 En inspirant, je prends conscience d’un objet vu
En expirant , je médite sur toutes les causes et conditions qui ont permis
la manifestation de cet objet
7 En inspirant, j'observe ma conscience visuelle
En expirant, j'observe quelles sont les conditions de cette conscience
8 En inspirant, la vue me donne une représentation de mon environnement
En expirant, je sais que ce n’est qu’une toute petite partie de cet environnement
9 En inspirant, je vois que ces trois éléments yeux, objet de la vue et conscience visuelle sont interdépendants
En expirant, je vois qu'ils ne sont pas dotés d’une existence séparée.
Bahiya Sutta
cité parAjahn Passanno et Ajahn Amaro
dans « The Island : The Udana - Inspired Utterances of the Buddha »
… Impressionné par la sincérité et l’insistance de Bahiya, le Bouddha déclara alors
« Dans ce qui est vu, il n’y a que ce qui est vu,
Dans ce qui est entendu, il n’y a que ce qui est entendu,
Dans ce qui est ressenti[ odeur, goût et toucher], il n’y a que ce qui est ressenti,
Dans ce qui est connu, il n’y a que ce qui est connu.
Voilà Bahiya, comment tu dois t’entrainer à voir les choses.
Et quand, Bahiya, il n’y aura pour toi
Que ce qui est vu dans ce qui est vu
Que ce qui est entendu dans ce qui est entendu
que ce qui est ressenti dans ce qui est ressenti
Et que ce qui est connu dans ce qui est connu,
Alors, Bahiya, il n’y aura pas de »moi » lié à tout cela.
Et quand, Bahiya il n’y a pas de « moi » lié à tout cela,
Il n’y a pas de « moi » là-bas.
Et quand, Bahiya, il n’y a pas de moi là-bas,
Alors, Bahiya tu n’es ni ici, ni là-bas, ni entre les deux.
Cela, simplement cela est la fin de la souffrance. »